Enrique Serna est né à Mexico en 1959 et a déjà publié en France Amours d'occasion, un recueil de nouvelles explorant les thèmes du désir, de la frustation, de l'accomplissement de soi...
Thèmes omniprésents dans La Peur des bêtes, à travers le prisme cette fois d'une enquête policière.
Evaristo Reyes, ex-journaliste idéaliste et désormais employé à la police judiciaire de Mexico, est un homme usé, qui a perdu ses rêves de jeunesse en même temps que l'estime de soi. S'il n'a pas de sang sur les mains comme son supérieur, le commissaire Maytorena, archétype du flic violent et corrompu jusqu'à la moëlle, il n'est pas moins complice de ses combines et s'enfonce dans la pourriture et le remord.
Chargé d'enquêter sur un écrivain contestataire, il est bientôt suspecté de sa mort, étant le dernier à l'avoir vu vivant. Pour débusquer le véritable assassin, Evaristo fréquente les milieux littéraires et intellectuels de la ville, où se nichent aussi bien les rancunes et les jalousies tenaces que les manoeuvres les plus abjectes et les plus sournoises. Quand l'infamie prend le masque de la vertu...
Au fil de son enquête, il se libère de l'emprise de Maytorena et retrouve peu à peu sa fierté et son honneur.
Si La Peur des bêtes dresse un tableau féroce d'une société mexicaine fataliste et complexée, gangrénée par la corruption qui s'étend peu à peu tel un cancer généralisé, Enrique Serna fait aussi un éloge chaleureux - mais sans naiveté - de sa patrie quand il souligne les difficultés que traverse son peuple et les soubresauts, souvent sanglants, de la démocratie et du progrès.
Une belle découverte et un auteur à suivre.
La peur des bêtes / Enrique Serna (trad. de l'espagnol (Mexique) par François Gaudry. Phébus, Rayon noir, 2006 ; rééd. Points roman noir, 2007)