20 avril 2008
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Après De chair et de sang et De cendre et d'os, voici le troisième et dernier (?) volume de la série consacrée à l'ancien flic Frank Elder. Du même (gros) calibre que les précédents.
Toujours reclus volontaire au fond de ses Cornouailles, Frank cède cette fois aux appels de son ex-femme Joanna : la soeur d'une de ses amies a disparu depuis une semaine. Presque à contrecoeur, notre ex-inspecteur rejoint Nottingham, ce qui lui donne surtout l'occasion de revoir sa fille, qui se remet lentement de l'épreuve qu'elle a traversée deux ans plus tôt, épisode relaté dans De chair et de sang (je me permet d'insister sur l'intérêt de lire ces trois romans dans l'ordre, pour comprendre d'autant mieux les rapports d'Elder avec sa fille, son ex-femme ou ses anciens collègues).
Quelques jours plus tard on retrouve la femme chez elle, allongée tranquillement sur son lit, élégamment vêtue, sans vie. Les circonstances, le soin apporté par l'assassin au corps de la victime rappellent à Elder une ancienne affaire non élucidée. Il est bientôt engagé comme consultant civil par la police et retrouve Maureen Prior, avec qui il a travaillé autrefois.
L'enquête commence, incertaine, sinueuse... On tente de trouver un lien entre les deux meurtres. Elder réinterroge d'anciens témoins, les sonde, en bon flic déductif et psychologue. Renseignements, témoignages, indices : on vérifie, on croise, on suppute, on échafaude, on re-vérifie. Des lignes apparaissent, des perspectives se dégagent, un relief se dessine, toujours indistinct.
Harvey, en véritable architecte, excelle dans la construction du récit et l'assemblage du puzzle policier, au gré d'intrigues et de récits croisés dont il a le secret.
Comme souvent chez lui, les victimes sont des femmes esseulées et certains ressorts de ce roman ne sont pas sans rappeler Coeurs solitaires.
Que le soliste soit son personnage-fétiche Resnick (qui revient apprend-on !) ou Frank Elder, la petite musique (de chambre) de John Harvey nous séduit toujours, harmonieuse et profonde. Elle nous émeut aussi, ce qui n'est pas la moindre de ses qualités.
Simplement, John Harvey compte aujourd'hui parmi les meilleurs écrivains de polar, et construit, roman après roman, une oeuvre (oui, je pèse le mot) absolument remarquable.
Sans effets de manche ni surenchère morbide.
Sans bruit ni fracas.
Si Ellroy fait dans le monumental, Crumley dans la folie douce, Sallis dans l'ellipse, en une sorte de pointillisme littéraire, Harvey, pour sa part, déroule paisiblement ses phrases, sans à-coups sans envolées, dans un style simple, presque discret.
D'ombre et de lumière / John Harvey (trad. de l'anglais par Jean-Paul Gratias. Rivages-Thriller, 2008)
PS : ...une toute récente interview de l'auteur sur Bibliosurf.
Toujours reclus volontaire au fond de ses Cornouailles, Frank cède cette fois aux appels de son ex-femme Joanna : la soeur d'une de ses amies a disparu depuis une semaine. Presque à contrecoeur, notre ex-inspecteur rejoint Nottingham, ce qui lui donne surtout l'occasion de revoir sa fille, qui se remet lentement de l'épreuve qu'elle a traversée deux ans plus tôt, épisode relaté dans De chair et de sang (je me permet d'insister sur l'intérêt de lire ces trois romans dans l'ordre, pour comprendre d'autant mieux les rapports d'Elder avec sa fille, son ex-femme ou ses anciens collègues).
Quelques jours plus tard on retrouve la femme chez elle, allongée tranquillement sur son lit, élégamment vêtue, sans vie. Les circonstances, le soin apporté par l'assassin au corps de la victime rappellent à Elder une ancienne affaire non élucidée. Il est bientôt engagé comme consultant civil par la police et retrouve Maureen Prior, avec qui il a travaillé autrefois.
L'enquête commence, incertaine, sinueuse... On tente de trouver un lien entre les deux meurtres. Elder réinterroge d'anciens témoins, les sonde, en bon flic déductif et psychologue. Renseignements, témoignages, indices : on vérifie, on croise, on suppute, on échafaude, on re-vérifie. Des lignes apparaissent, des perspectives se dégagent, un relief se dessine, toujours indistinct.
Harvey, en véritable architecte, excelle dans la construction du récit et l'assemblage du puzzle policier, au gré d'intrigues et de récits croisés dont il a le secret.
Comme souvent chez lui, les victimes sont des femmes esseulées et certains ressorts de ce roman ne sont pas sans rappeler Coeurs solitaires.
Que le soliste soit son personnage-fétiche Resnick (qui revient apprend-on !) ou Frank Elder, la petite musique (de chambre) de John Harvey nous séduit toujours, harmonieuse et profonde. Elle nous émeut aussi, ce qui n'est pas la moindre de ses qualités.
Simplement, John Harvey compte aujourd'hui parmi les meilleurs écrivains de polar, et construit, roman après roman, une oeuvre (oui, je pèse le mot) absolument remarquable.
Sans effets de manche ni surenchère morbide.
Sans bruit ni fracas.
Si Ellroy fait dans le monumental, Crumley dans la folie douce, Sallis dans l'ellipse, en une sorte de pointillisme littéraire, Harvey, pour sa part, déroule paisiblement ses phrases, sans à-coups sans envolées, dans un style simple, presque discret.
D'ombre et de lumière / John Harvey (trad. de l'anglais par Jean-Paul Gratias. Rivages-Thriller, 2008)
PS : ...une toute récente interview de l'auteur sur Bibliosurf.