Des nouvelles à l'unité. Sur tout ou rien, sur le quotidien et l'extraordinaire. Autrement dit La porte à côté, l'une des collections des éditions de l'Atelier in8, que je vous invite vivement à découvrir si ce n'est pas déjà fait.
Le quotidien, justement, il a pas l'air rose pour "Boulette", dans cette baraque des environs de Calais, entre un BEP cuisine et le père qu'arrête pas de l'appeler la grosse, qui traîne derrière lui sa bonbonne d'oxygène comme sa haine des étrangers. D'ailleurs, sur le buffet de la cuisine, le portrait de Le Pen a remplacé celui de Lénine.
Le Pen justement, ça me rappelle une de ses saillies nauséabondes, en substance : "Il est normal de préférer son frère à son cousin, son cousin à son voisin et son voisin à un étranger." Sûrement que Boulette l'enverrait se faire pendre en entendant ça.
Un étranger, justement, elle en trouve un dans l'abri de jardin - You... arab ? No, Kurd ! Kurd ? Yes, Kurd of Iraq -, et décide immédiatement de le cacher, de le nourrir, de l'aimer. Et même de s'enfuir avec lui de l'autre côté de la Manche.
Elle est touchante, Boulette, dans ses élans, dans sa naïveté, et pour un peu on lui souhaiterait bonne chance, mais on sent bien que ça va mal tourner cette histoire, au final...
La nouvelle, c'est un art de l'esquisse, et Max Obione l'a bien compris, qui en peu de mots, quelques détails, quelques images, crée tout un univers, dont on devine les contours, dont on saisit l'essentiel.
Boulette, c'est une mignonnette à lire cul-sec, une vingtaine de pages douces-amères. Le temps d'un court trajet, par exemple. Attention quand même à ne pas rater l'arrêt.
Boulette / Max Obione (L'Atelier in8, La porte d'à côté, 2011)