Samedi après-midi donc, on recevait Patrick Bard à la médiathèque, accompagné de celle qui partage sa vie, ses voyages et collabore avec lui depuis de nombreuses années, Marie-Berthe Ferrer.
Le courant est vite passé, et les deux complices n'on pas tardé à me raconter leur récent reportage à Cuba et leurs rencontres avec de nombreux écrivains, en vue d'un numéro spécial de Courrier international/Ulysse à paraître le mois prochain - à surveiller. Après avoir discuté de choses et d'autres, 16 heures ont sonné, il était temps d'y aller.
En deux heures, impossible de passer en revue tous les livres de Patrick Bard, polars, carnets de voyage, livres de photos... J'avais donc décidé d'axer la rencontre sur l'Amérique latine, commencer par le Mexique avec La frontière pour descendre ensuite vers le Guatemala où se déroule son dernier roman, Orphelins de sang. Evidemment, la discussion dérive, prend des chemins de traverse, bifurque, revient... C'est ce qui en fait aussi l'intérêt.
De sa passion pour le Mexique ("là où a cédé la digue des mots"), à la façon dont il combine écriture et photographie, on n'a pas vu les deux heures passer.
Entretemps, Patrick Bard aura évoqué les meurtres de Ciudad Juarez, les terribles conditions de vie des ouvrières des maquiladoras, la violence endémique, les particularités de ce "troisième pays" américano-mexicain, de ses paradoxes ("par exemple, Ciudad Juarez, un des villes les plus dangereuses du monde, touche El Paso, la ville la plus sûre des Etats-unis"), l'histoire mouvementée et méconnue du Guatemala, de ces pays où la police et les narcotraficants se rejoignent, où le prix de la vie humaine est très bas, de la façon dont le corps de la femme devient le champ de bataille des hommes, ce qui lui a donné envie d'écrire là-dessus, du rapport entre réel et fiction et du pouvoir de la littérature...
Des sujets pas toujours très rigolos, vous vous en doutez, mais une discussion passionnante. Parce que Patrick Bard connait cette région du monde sur le bout des doigts, qu'il l'a écumé en long et en large, et qu'il trouve les mots justes pour vous expliquer comment ça se passe - ce qu'il y a de pire comme ce qu'il y a de beau -, avec enthousiasme et cette envie de raconter, de partager qu'on retrouve dans ses livres.
Le public (assez clairsemé, tout de même, et ça j'ai encore du mal à l'avaler, je l'avoue, même si les gens présents, eux, semblaient ravis) est resté scotché un bon moment, avant que les visages se relâchent, que les questions viennent, qu'un échange s'instaure, et que la discussion se poursuive, pendant la dédicace qui a suivi, entre les lecteurs et l'auteur, ou entre les lecteurs eux-mêmes.
Bref, un excellent moment. Comment dire... Le genre de rencontre dont vous ressortez un peu moins bête, je ne peux pas mieux dire.
@Holden : Patrick Bard est effectivement en train d'écrire sur l'histoire d'une famille espagnole (mais tu m'avais dit "italienne") sur plusieurs générations, il en est même à la moitié.
Promis, d'ici quelque temps (disons quand j'en trouverai assez), vous aurez droit à une retranscription, au moins partielle, de la rencontre.
Sinon, on se retrouve demain ou après-demain, pour le dernier Nesbo.